Trois ans après un accident dramatique sur l’A64 causé par un sanglier, la justice se penche sur les responsabilités de Vinci Autoroutes. Au cœur des débats : la sécurisation des clôtures et la gestion du risque faunique.
Le 28 janvier 2022, en pleine soirée d’hiver, un drame a lieu sur l’autoroute A64, à hauteur de Bellocq, dans les Pyrénées-Atlantiques. Un sanglier surgit sur la voie rapide. Trois voitures impliquées, six blessés légers, mais surtout une victime : Leire Iribarne, 24 ans, chanteuse et claviériste du groupe basque Diabolo Kiwi, décède sur le coup. Elle se trouvait à bord d’un véhicule de covoiturage.
Trois ans plus tard, c’est au tour de Vinci Autoroutes d’être convoquée devant le tribunal administratif de Pau. L’enjeu : déterminer si le concessionnaire a failli à ses obligations de sécurité, notamment concernant l’entretien des grillages censés empêcher la faune sauvage d’entrer sur la chaussée.
Des clôtures trouées, un accident évitable ?
Pour la famille de la victime, représentée par l’avocat Nicolas Taquet, l’accident n’a rien d’une fatalité. « Nous avons démontré que cet accident n’était pas le fruit du hasard », affirme-t-il. Selon des constats d’huissier, près de 80 mètres de grillage étaient endommagés à proximité de l’échangeur n°7 de Bellocq. Des brèches similaires auraient été relevées à d’autres endroits sur le tracé de l’A64.
Face à ces accusations, l’avocat de Vinci Autoroutes, Antoine Chauveau, rappelle qu’ »une autoroute ne peut pas être totalement étanche » et affirme que des inspections régulières sont effectuées chaque année. Des déclarations qui n’ont pas calmé la douleur ni la détermination des proches de la victime.
Un espoir de justice et de changement
Lors de l’audience du 12 mai, le rapporteur public a recommandé une condamnation de Vinci Autoroutes à hauteur de 25 000 euros. Une somme symbolique pour la famille, mais un signal fort quant à une possible reconnaissance de responsabilité.
Pour Markotx Iribarne, le père de Leire, ce procès dépasse le cadre personnel. « Ce n’est pas qu’une question d’indemnisation. C’est aussi une exigence de changement. Il faut contraindre ces grandes entreprises à prendre au sérieux le risque lié à la faune sauvage », martèle-t-il.
Dans un pays où la présence de sangliers sur les routes est devenue un enjeu croissant de sécurité, avec des populations en constante augmentation et des territoires de plus en plus urbanisés, cette affaire pourrait faire jurisprudence. Et souligner une nouvelle fois la nécessité de renforcer les dispositifs de protection le long des axes autoroutiers traversant des zones rurales et forestières.
Le tribunal administratif de Pau rendra sa décision début juin. En parallèle, une procédure pénale est également en cours, mais sans calendrier défini à ce jour.